Je continue de rattraper mon retard en matière de films d’horreur. Depuis que, par une calme après-midi d’été, Maloriel m’a emprunté le DVD de L’exorciste, elle est progressivement devenue LA spécialiste de la maison, et tout ce que je fais depuis, c’est suivre ses recommandations… Au temps pour ma réputation !
Il existe plusieurs catégories de films d’horreur, un terme bien trop général pour un genre qui s’attaque à tout ce qui peut effrayer un être humain, autant dire des choses très, très variées. Souvent, quand je parle de ce type de films aux gens qui m’entourent, j’obtiens la réaction suivante : « ah, non, je sais pas comment tu fais pour regarder ça, moi j’aime pas. » Mais de quoi parlez-vous, quand vous dites « ça »?
Je veux bien admettre que vous n’aimiez pas avoir peur – bien que je ne comprenne pas :)
Je suppose également que par « ça », vous entendez : le sang. Ou quelque chose d’approchant.
Mais enfin, il y a quand même un monde, entre le slasher benêt à la Souviens-toi l’été dernier, le film onirique façon Nightmare on Elm Street, le pulp à la Zombieland et les thrillers hyper-réalistes comme The Last house on the left…! Et encore, si on prend, par exemple, la catégorie « films de zombies », je vous assure qu’il n’existe pas grand rapport entre Night of the Living Dead et Shaun of the dead.
Il y a des films d’horreur violents, d’autres simplement effrayants (pour peu que vous soyiez sensibles au sujet traité.) Et il y a des films d’horreur que tout le monde a vu et le plus souvent apprécié, comme El Laberinto del fauno (c’est pas pour me la péter, mais c’est tellement plus joli en VO ;)). Qui est, je suis désolée, un vrai film d’horreur, avec monstres, psychopathes et scènes de torture. Vous n’aimez pas quand il y a du sang ? Quand les gens souffrent ? Pourquoi vous aimez Million Dollar Baby, alors ? (film qui m’a proprement traumatisée). Dead Snow est peut-être dix fois plus gore, mais c’est une putain de fiction avec des zombies nazis ! Bon OK, Dead Snow, c’est ptêt un peu gratuit :D
Pour en finir avec les idées reçues (et les cheveux cassants), je propose mon top 10, et je vous explique pourquoi. Et puis je parlerai aussi de films qui ne figurent pas à mon panthéon personnel (oui, y’a de la place, dans ma tête), mais qui méritent d’être vus quand même (elle se la pète celle-là c’est pas croyable) (il y a beaucoup de voix, aussi, dans ma tête) (si tu te taisais, ça ferait une de moins).
J’exclue d’emblée de cette sélection deux types de films : les survivals, et ceux que je réunirai abusivement sous la bannière slasher, incluant par là The Last House on the Left* et Straightheads.
Les survivals : parce qu’il en existe de très bons, mais que, quand même, ce n’est pas dans ce genre de films qu’on trouve le plus matière à réflexion. C’est cool si on aime les bêtes qui font peur, comme le crocodile géant de Rogue, ou les magnifiques lions de Prey. (Je sais que je donne des tas de références, mais j’suis un peu obligée ;))
Les slashers : la plupart du temps, un slasher, c’est vraiment con. On le regarde en mangeant des pop-corns et en pariant sur le moment où la blonde va mourir. Les deux titres que j’ai cités plus hauts sont beaucoup plus intelligents, mais… ils méritent un autre type de développement, que je ferai plus tard**.
*Honte à moi, je n’ai pas encore vu la version originale, réalisée par Wes Craven. Mais il a produit le remake, donc…
**En fait, d’aucuns appellent ce genre de films des rape and revenge, mais je trouve ça un brin réducteur.
Et pour pas changer des bonnes habitudes, on commence avec un film, ou plutôt deux, hors-compétition.
Alien (Ridley Scott, 1979) et Alien Resurrection (J.-P. Jeunet, 1997)
Pourquoi hors-compétition ? C’est qu’à bien y réfléchir, il y a du slasher, dans Alien. C’est-à-dire qu’on assiste bien aux tentatives de survie d’une bande de mecs poursuivis par un tueur. C’est de la science-fiction, aussi, alors qu’à mon sens les films d’horreur ressortissent plutôt du fantastique.
J’ai vu Alien 4 pour la première fois lors de sa sortie au cinéma ; j’étais en quatrième. Je m’en souviens très bien parce que j’avais demandé à deux de mes copines si elles voulaient m’accompagner. Elles ont dit oui, mais en apprenant ce qu’on prévoyait d’aller voir, leurs parents, eux, ont dit non. Les miens, apparemment, s’en foutaient, et je leur en suis très reconnaissante. J’ai donc été au cinéma toute seule. On était trois dans la salle, et quand j’ai sursauté, je pense que le type avec qui je partageais la rangée l’a bien senti.
C’était ma première rencontre avec Alien. J’ai trouvé que la résurrection de Ripley était tout à fait capillotractée (mais j’ai un gros problème avec ces histoires de clonage), mais le reste m’a beaucoup impressionnée.
Plus tard, mon père m’a offert le super-coffret-méga-cool de la quadrilogie. Avec la couv’ en relief, s’il vous plaît. J’adore plein de choses dans Alien 4, dont : « Ma maman m’a toujours dit que les monstres n’existaient pas », dit Ripley, sur un ton détaché, calme, superbement doublée. Et la scène où un personnage dont j’ai oublié le nom, porteur d’un alien mais méconnaissant sa situation exacte, regarde le groupe, paniqué, et répète, sur un ton de plus en plus hystérique : « Qu’est-ce que j’ai à l’intérieur de moi ? Qu’est-ce que j’ai à l’intérieur de moi ? Putain, dites-moi ce que j’ai à l’intérieur !?
– Un étranger »
répond Ripley, toujours aussi calme.
Je ne me lasse pas de revoir cette scène, qui d’après moi revêt un sens symbolique extrêmement fort : c’est une image de maternité. Le fait qu’elle soit incarnée par un homme, et que son issue soit aussi violente, ne font que renforcer son impact. Pour des raisons similaires, cette scène fondamentale du premier film, aussi marrante soit-elle trente ans après, est l’une des premières à m’avoir autant traumatisée. Parce que, en ce qui me concerne, les choses les plus effrayantes (exception faite de trucs imaginaires et/ou sujets à interprétation) sont la maladie et la perte de contrôle de son propre corps.
Alien bénéficie d’une esthétique frappante. Pas celle du vaisseau, évidemment, le premier Alien a quand même très mal vieilli, visuellement parlant. Mais d’emblée, l’Alien est une créature superbe. Puissante et intelligente. Parfaite (comme le remarque sur un ton extatique le dément docteur Gediman). Le quatre confirme la particularité de Jeunet – loin, si loin, du terrifiant Amélie Poulain.
Que dire ? Alien est un film haletant, porté par une créature cauchemardesque, bénéficiant d’un fond symbolique passionnant, qui, une fois n’est pas coutume, s’achève en apothéose, avec des scènes claustrophobiques (oui, parfaitement) et une créature à moitié humaine horriblement malsaine. La relation que Ripley entretient avec elle n’est pas pour rien dans cette impression – encore, cette maternité monstrueuse qui me fascine.
Je vois venir la question : qu’est-ce qui te fascine dans ce qui est malsain ?
Les choses qui me font peur m’intéressent parce qu’elles veulent dire quelque chose. Les choses glauques nous rappellent qu’un être humain est un amas de viscères. On a tendance à l’oublier… c’est pas forcément un bien.
Les films d’horreur remettent la vie en perspective. Ils nous obligent à affronter la mort et la douleur. Je pense que c’est d’ailleurs la raison pour laquelle on voit aujourd’hui une véritable surenchère d’effets visuels dégueulasses : on vit dans une société de plus en plus lissée, de plus en plus terrifiée par la mort et la vieillesse. Les films d’horreur sont un rappel. Il n’y a pas de complaisance ou de voyeurisme à les regarder, mais la volonté de se réapproprier nos peurs, le désir d’appréhender l’inconnu. A trop vouloir ignorer ces choses et à se persuader que le monde ressemble à celui d’Amélie Poulain, on est complètement désemparé au moment où la réalité nous confronte.
Bonne idée, ce top 10 de tes films d'horreur (ça me fait penser que je voulais faire la même chose mais avec les films d'animation. Mais comme je ne pouvais pas me limiter à 10, j'ai laissé tomber).
Alien ? Sans doute ma série SF préférée (avec Star Wars bien sûr, mais c'est pas pareil). Je me souviens avoir flippé à mort quand j'avais vu le premier, j'étais jeune, et je n'avais même pas réussi à voir le deuxième en entier.
C'est pour moi, la créature la plus emblématique, la plus flippante du cinéma, designée par l'un des maîtres de l'illustration glauque, Giger.
Ce que j'aime bien avec cette série, c'est qu'ils ont chacun une couleur propre, différente d'un film un l'autre, mais reconnaissable aisément (les filtres bleus pour Cameron, vert et poisseux pour Fincher). Le 4 par contre, me fait un peu mentir, puisque on n'y retrouve pas beaucoup la patte de Jeunet…
Tout à fait d'accord avec tout ce que tu dis, je n'aurais pu mieux défendre la série ;) Et je suis contente que mon idée de top 10 te plaise (il serait temps que je balance la suite, d'ailleurs… j'ai juste bossé 48h cette semaine, mais ceci est une autre histoire!)
Je connais très très mal Jeunet, mais on retrouve un peu ces ambiances malsaines dans La cité des enfants perdus, non? Et il y a le traitement de la lumière, aussi, j'ai l'impression (je pense notamment à cette salle dénuée d'ombres dans laquelle les savants du vaisseau pratiquent des croisements contre nature)